La question de la prise en charge ou de la non-prise en charge des frais liés au télétravail est surement la question que l’on me pose le plus.
L’indemnisation du télétravail est en effet un sujet complexe surtout pour les entreprises qui ont découvert récemment le télétravail.
Les communications du Gouvernement, les fameuses Questions-Réponses présentées en mai 2020, n’ont rien arrangé.
Le Ministère du Travail mentionne en effet que le salarié ne serait pas en droit d’être remboursé des frais découlant du télétravail sauf si un accord ou une charte le prévoit.
Cette annonce était justifiée, certainement, sauf que … on peut douter de sa valeur juridique dans un pays où la loi et la jurisprudence s’entendent pour dire le contraire …
Jusqu’en 2017, l’employeur avait l’obligation de prendre en charge les coûts découlant directement de l’exercice du télétravail.
Depuis, cette disposition a été supprimée du Code du travail. La loi ne prévoit donc plus d’obligation expresse d’indemnisation. Mais cela n’implique toutefois pas que le salarié doit supporter la charge de toutes les dépenses liées au télétravail.
Très clairement, l’employeur est tenu de prendre en charge les frais professionnels engagés par le salarié pour les besoins de son activité professionnelle, qu’il soit dans un bureau ou chez lui.
Il faut savoir que déjà, pour les entreprises adhérentes au Medef, à la CGPME (Confédération des petites et moyennes entreprises) et à l’U2P (Union des entreprises de proximité) le remboursement des frais de télétravail est toujours dans le cadre de l’accord national interprofessionnel de 2005.
Mais, de manière plus générale, tous les employeurs sont tenus de prendre à leur charge certains frais engendrés par les salariés en télétravail. Si le télétravail engendre des frais aux salariés, ce n’est pas à eux de les assumer.
C’est une des questions qui divisent le plus les employeurs.
Certains ont déjà l’impression de faire un geste, un pas en avant, en autorisant le télétravail.
Si on leur impose, en plus de tout ça, des nouveaux frais, des conflits et des inégalités liés à ça … ça risque de les effrayer.
Ce n’est pas toujours évident de dépasser les premières pensées parfois limitantes, surtout quand elles entraînent de nouvelles dépenses, voir des inégalités entre les salariés.
Mais il faut réussir à envisager le télétravail comme une évolution de son entreprise, de son mode de travail et non comme un avantage qu’on accorde à ceux qui le méritent.
En prenant ce recul, et en voyant le télétravail comme un investissement dans votre entreprise, pour également fidéliser vos salariés, les faire travailler dans de meilleures conditions, cela vous permettra de relativiser face à ces dépenses … en les comparant par exemple aux frais de recrutements liés au turover, aux manques de productivité liés à l’absentéisme et au manque de motivation.
Je vous encourage donc fortement à dépasser cette question et de souhaiter investir dans vos équipes et dans le télétravail.
Et donc, juridiquement parlant, si vos salariés ont un télétravail régulier, il doit être prévu une indemnisation de leurs frais de télétravail, même pendant la crise sanitaire, et même en l’absence d’accord ou de charte d’entreprise le prévoyant.
Déjà commençons par les frais qui étaient déjà pris en charge à savoir les transports et les frais de repas.
Même si votre salarié est en télétravail, il conserve ses droits acquis et ses avantages comme un salarié “classique” avec des guillemets même si vous ne me voyez pas les mettre.
Donc les tickets restaurant restent acquis : on ne supprime pas les tickets restaurant aux télétravailleurs
et de la même façon, le remboursement des frais de transport n’est pas remis en question.
Si votre salarié télétravail à 100% et ne se déplace plus, bien-sur, les frais de transport ne sont plus à prendre en charge (sauf s’il va au bureau rencontrer les équipes ou s’il se rend dans un espace de coworking)
Concernant les autres frais pris en charge, L’URSSAF met à disposition un tableau sur son site permettant l’évaluation des frais.
Dans cette liste, on trouve :
– Les frais fixes (loyers, taxe d’habitation, taxe foncière, assurance habitation)
– Les frais variables (électricité, chauffage, climatisation)
– Les dépenses liées à l’acquisition du mobilier, d’un bureau, d’une chaise ergonomique, lampe, meuble de rangement. …
– Les frais liés à l’adaptation du local (conformité électrique, installation de prise)
– Tout ce qui est matériel informatique bien sur (ordinateur, imprimante, …)
– Les consommables (papier, cartouche)
– Les frais de connexion (téléphone, internet)
En fonction de la nature des dépenses, il peut s’agir d’une quote-part ou d’un remboursement de la totalité sur justificatif.
L’employeur a deux options :
– mettre en place un remboursement sur facture
– mettre en place un forfait par mois par salarié
Cette dernière option est la plus répandue dans les entreprises.
Surtout depuis fin 2019 avec la mise en place d’un barème visant à simplifier, pour les entreprises, le remboursement des frais professionnels engagés par les salariés en télétravail.
La somme est exonérée de charges sociales dans la limite globale de 10 euros par mois si le salarié effectue une journée de télétravail par semaine, limite de 20 euros par mois pour un salarié qui télétravaille deux jours par semaine ; 30 euros par mois pour trois jours télétravaillé par semaine, etc.
Si ces limites sont respectées, il n’est donc plus nécessaire pour le salarié de fournir à son entreprise des justificatifs de frais.
La plupart des entreprises ont mis en place ce forfait mensuel. Cela évite des situations conflictuelles et de s’exposer à des redressements.
Surtout, c’est aussi voir le le télétravail est vu comme un mode d’organisation dans lesquelles elles choisissent aussi d’investir plutôt que de le subir.
Le télétravail est choisi, mis en place dans l’entreprise et donc pris en charge. Pour le salarié, c’est aussi une preuve de considération de son employeur.
En résumé, la question des indemnités télétravail est complexe, car elle va dépendre de chaque entreprise et de sa maturité sur la question du télétravail.
Si le télétravail est régulier, n’oubliez pas d’ajouter dans vos accords ou la charte télétravail, une mention sur les frais pris en charge. N’indiquez jamais que vous ne prenez aucuns frais en compte et que tout est à la charge de votre salarié. Vous seriez dans l’illégalité.
Si vous souhaitez en savoir plus ou si vous avez des questions, n’hésitez pas à utiliser les commentaires : je serai ravie de répondre d’échanger avec vous au sujet des indemnités.